jeudi 19 février 2009

Mercredi 18 février

Article de "http://infoantilles.sasi.fr/web/infoantilles/Actualites.nsf/Actualites%20Antilles%20accueil/D11F8AE8FC91CF0D042575610045A38C?opendocument

Le Carnaval maintenu à Fort-de-France
Le député-maire de Fort-de-France a annoncé hier soir le maintien du Carnaval dans la capitale du 21 au 25 février prochains. Le syndicat de police Synergie émet des doutes sur les conditions de sécurité. A Ducos et au Lamentin, le carnaval est annulé
La question peut paraître accessoire en ces temps de crise alors qu'elle est au fond, très stratégique. Faut-il annuler le carnaval 2009 en Martinique ? Alors que cela fait deux semaines pleines que l'ile est paralysée par la grève générale, les autorités et les élus sont partagés sur l'opportunité de maintenir les festivités carnavalesques qui doivent débuter ce week-end. Réunis hier après-midi à Fort-de-France, les élus de la capitale, eux, ont tranché pour le maintien du Carnaval 2009 dans la ville. Le député-maire, Serge Letchimy, estime que l'annulation des festivités aurait risqué d'entrainer des débordements plus graves que leur maintien, refusant pour autant de parler de "soupape" de sécurité. Il fait le pari de l'auto-discipline des Martiniquais dans les défilés. Mais les policiers ne partagent pas tous son optimisme. Le syndicat Synergie-Officiers estime que la grève générale n'a pas laissé le temps de préparer correctement l'encadrement du carnaval cette année alors que des dizaines de milliers de personnes se retrouveront dans la capitale dès ce week-end. Au Lamentin et à Ducos, en revanche, les maires ont décidé d'annuler toutes les festivités.

Illustrations de GABOURG
http://www.infoantilles.com/gabourg/crise-greve-antilles-2009.asp


Comment les produits d importation sont-ils taxés?
Article du Monde
http://www.lemonde.fr/a-la-une/article/2009/02/19/comment-les-produits-d-importation-sont-taxes_1157548_3208.html

lettre ouverte, faire passer.....

J’ai peur !
(Lettre ouverte aux miens)

Oui, je tremble de peur ! Une peur qui me prend aux tripes et m’enlève le sommeil, me tient collée au poste de radio quand l’absence d’essence me garde clouée chez moi et m’empêche d’être là, au cœur de l’action, auprès de mes camarades et de mon peuple debout. Mon peuple debout et surpris de l’être, surpris de sa propre force, de son propre pouvoir, de sa propre combativité, mon peuple interloqué, étourdi, estèbekwè de lui-même, incrédule encore : « C’est nous, ça, ce magma, cette déferlante, marchant sans faiblir sous le soleil ardent, avalant les kilomètres, du Boulevard Général de Gaulle à Dillon ? C’est nous, dépassant la peur du manque et l’angoisse par anticipation à l’idée de nos fiches de salaire douloureusement légères ? C’est bien nous, chaque jour, tous les jours, 10, 20000 dans les rues de Foyal et des communes ? »
C’est nous, oui, c’est bien nous, au mitan de ce moment historique, inédit, nous, entrant dans l’Histoire, la nôtre bon sang !
Nous, qui n’avons pas le droit de passer à côté de cette page d’Histoire nôtre, nous qui n’avons pas le droit de la ternir, cette page, d’en diluer l’encre dans nos petitesses et nos luttes intestines. Nous, qui n’avons pas le droit de permettre aux Jego, Sarkozy et autres békés de se gausser de ce qu’ils tentent de réduire à un « jeu de rôles » un carnaval avant le carnaval.
Nous n’avons pas le droit de perdre la face, nous n’avons pas droit à l’échec.

Pourtant l’ombre de l’échec est là, tapie, s’alimentant à la source de nos ego surdimensionnés, et de notre penchant à la surenchère.
Surenchère de ceux qui, tout en étant dans l’action se posent en spectateurs critiques, en donneurs de leçons sans aucun respect ni aucune considération pour ceux qui, depuis le début du conflit et en réalité depuis des décennies, se battent pour faire porter et faire avancer les revendications populaires.
Savent-ils de que cela peut être de négocier sous la pression à la fois inconsciente mais aussi concrète et presque physique de la rue impatiente et exigeante et sur celle, pernicieuse, tentaculaire d’un patronat, d’une caste, d’un Etat qui ne veulent rien lâcher de leurs privilèges acquis ? Savent-ils ce que cela peut être de ne dormir que quelques heures, de contenir son ego et sa propre impatience, de trembler d’échouer, de redouter de desservir son parti ou son syndicat face à l’impérieuse nécessité de l’unité, de la cohésion ?
Ces camarades-là méritent notre respect et notre admiration ; là, dans l’urgence de la rédaction de cette lettre ouverte, je ne peux me souvenir de chacun des représentants du collectif, mais chacun (Doré, Monrose, Pierre-Charles, Granville, etc.), tous, méritent notre respect et notre soutien.

Leur échec ne sera que le nôtre. Car nous aurons été incapables de leur garantir notre confiance et notre soutien indéfectible. Soutien indéfectible et confiance qui ne signifient en rien soumission au diktat du collectif, qui n’interdisent en rien la vigilance. Mais plutôt que donneurs de leçons acerbes, soyons force de proposition ; anticipons, réfléchissons avec eux et parfois pour eux parce que, pris dans l’urgence du moment présent, ils n’ont pas forcément toute la distance requise pour tout évaluer, tout réajuster en fonction des avancées, des reculs ou de l’actualité qui n’attend pas que les négociations se fassent tranquillement pour dérouler sa lave incandescente et capricieuse. Plutôt que de créer des collectifs-bis ou de faire bande à part sous le prétexte que nos représentants sont trop mous et pas aussi bien organisés que ceux de Guadeloupe ou encore que nos revendications sont trop spécifiques pour accepter de se « noyer » dans la plate-forme commune, réfléchissons ensemble au moyen de leur interdire d’échouer. N’offrons pas à nos adversaires et au monde l’image de nos mesquineries et de notre absence de cohésion. Et gardons-nous de manquer d’humanité. Car nous préoccupons-nous de savoir comment ils s’organisent pour manger, entre manif et négociations ? Qui « gère » leurs enfants pour ceux qui en ont, qui s’inquiète de soulager leur épuisement physique et nerveux pour les célibataires ? Pensons-nous à la solitude de ceux qui, ayant le sentiment de donner le meilleur d’eux-mêmes, sortent de « la gueule du loup » pour n’entendre que critiques et condamnations ?

Et puis, à travers nos revendications et exigences, que voulons-nous, in fine ? Notre impatience est-elle essentiellement celle de pouvoir aménager, humaniser un système par essence inhumain, (à l’image de Sarko qui se pose en Zorro d’un capitalisme plus humain) pour être enfin à l’aise pour consommer mieux, plus, toujours plus ? Pouvoir nous offrir plus de foie gras et de champagne à Noël ? Changer de voiture plus souvent ? Pour, le réfrigérateur et le congélateur pleins, nous laisser endormir par le ronronnement de nos télés qui distillent un imaginaire, une vision du monde qui n’ont rien à voir avec qui nous sommes ? Pour aller jouer les touristes arrogants à Margarita sans aucune curiosité –même touristique- pour le processus politique et social en cours au Venezuela ? Pour continuer, au lieu d’emmener nos enfants à la mer, à la campagne, ou à un cours d’arts plastiques ou de musique de leur proposer comme distraction top du top d’aller en promenade dans les temples du capitalisme que sont les centres commerciaux ? En un mot réclamons-nous « plus de pouvoir d’achat » pour consommer mieux, plus, pour faire les beaux jours de ceux qui nous manipulent avec notre consentement ou sommes-nous prêts à penser ensemble une autre façon d’utiliser les avancées salariales, sociales, culturelles, et osons le dire politiques pour remettre ce pays debout dans le cadre d’un projet sociétal, politique, écologique et humain complètement élaboré, forgé par nous et pour nous ?
Ce moment unique entre tous n’est-il pas l’occasion de passer nos comportements à la loupe de la vérité aussi dérangeante soit-elle ?
Car enfin, ce ne sont pas les grandes surfaces qui, après Cindy et Dean, ont proposé le pain au triple de sa valeur !
Et si la mission des capitalistes est de nous inciter à la consommation, où et quand s’exercent notre esprit critique, notre sens de la dignité ? Ecumons-nous les marchés et foires agricoles avant que d’aller tels des zombis acheter ce que l’on veut nous vendre et quel qu’en soit le prix dans les grandes surfaces ? Et les vendeurs et revendeurs des marchés mesurent-ils assez leur responsabilité quand ils proposent des fruits et légumes à des prix prohibitifs ? Car quand un kilo de bassignac est vendu 5 euros sous prétexte d’être hors-saison, comment ne pas comprendre qu’une RMIste préfèrera acheter des mangues américaines fades mais nettement moins coûteuses ? Comment lui interdire d’acheter des ignames venues de France si, sur l’étal voisin, notre pakala coûte deux fois plus cher ?

Adopter des comportements citoyens dans le sens d’une citoyenneté martiniquaise implique non seulement de se sentir, de se savoir, de se vouloir martiniquais mais également de ne pas avoir le sentiment d’être seul, marginal face à l’effort demandé. Cet être-citoyen se révèle une posture presque contre-nature en ce qu’elle exige une vigilance de chaque seconde, des efforts permanents et colossaux face au plus petit de nos actes, à la formation de la moindre de nos pensées.

J’ai peur en vérité… Puisque en cas d’échec, je devrai assumer, tout autant que les polémistes et détracteurs du Collectif du 5 février, tout autant que chacun des dirigeants et des acteurs du mouvement la responsabilité de cet échec. Que puis-je et comment puis-je aider, appuyer, participer, renforcer, anticiper et proposer ? Comment faire autrement que d’être présente un jour sur deux pour épargner l’essence ? Que faire d’autre que de m’efforcer, pendant les manifestations, de passer un peu dans chaque groupe du cortège et en dépit de mes convictions propres, être, me vivre comme CSTM, CDMT, MODEMAS, UFM, Konbit Rasin, Moun Lakilti, CGTM, chômeurs, Collectif du panier de la ménagère, etc. faisant miens leurs slogans, leurs revendications, leur enthousiasme, dans la tension et l’intention d’être au plus près de mon peuple uni dans la diversité de ses composantes, dans l’exigence de ne rien perdre de ce qui se joue là et de parvenir à en extraire l’essence, le sens pour l’heure encore illisible ?

En définitive, je me dois d’avouer que j’ai peur de l’échec qui révélerait la victoire de nos mesquineries sur l’élan de la générosité. J’ai tout autant peur de la victoire car alors saurons-nous, en dehors de tout triomphalisme arrogant et par-delà les appétits de pouvoir, de soif de reconnaissance des uns et des autres, saurons-nous mettre nos mains unies en coupe autour du germe, de la semence prêts à féconder nos terres, nos esprits, nos âmes si peu habitués si peu formés à ETRE dans la lumière et dans l’exigence de la responsabilité ?

Nicole Cage-Florentiny, écrivaine
Les Hauts de Villeneuve, le jeudi 12 février 2009

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